samedi 4 mai 2024

H.P.A : Haut Potentiel Amoureux : premier extrait, reconnexion

 Merci aux éditions Vérone de valider un objectif : publier un livre avec une maison qui ne soit pas à compte d'auteur. Ce qui veut dire que j'aurai une vraie promotion et des ventes dans des gros points de vente. Je présente donc ce roman avec un extrait (ou plutôt un chapitre entier) qui me tient particulièrement à cœur.
Bonne lecture !




"  Je marche d’un pas lent sur le chemin de promenade depuis quelques minutes lorsque je décide de m’assoir sur un banc. Il y en a plusieurs comme celui-ci sur l’ensemble du site : sculptés dans d’énormes troncs d’arbre.

Le ciel est magnifique grâce au coucher de soleil.

J’apprécie ce calme envahissant, grand absent de la ville en perpétuel mouvement. Le chant des oiseaux qui volent une dernière fois avant de trouver un perchoir pour la nuit est une douce mélodie à mes oreilles. Être face à la nature avec ses champs et ses arbres est plus agréable qu’être face à des murs de béton.

Les minutes défilent sans que je m’en aperçoive. Fascinée par ce spectacle naturel de couleurs vives et d’ombres qui se dessinent, je décide de prendre une photo. Cet instant est précieux, je souhaite m’en souvenir et pourquoi pas, le peindre sur une toile.

Un bruit de pas se fait entendre. Je n’y prête pas attention car je suis concentrée afin d’obtenir la meilleure photo possible. Une fois l’image capturée, je me retourne et aperçoit Roméo à une dizaine de mètres.


-  Tu me suivais ?

Je n’ai pas pu m’empêcher d’être sur la défensive. Je regrette instantanément cette remarque.

 - Je rentrais chez moi surtout…

Il semble contrarié par mon attitude. Vite je dois rattraper le coup !

- Je plaisantais, pardon… Tu peux même te poser un moment si tu veux.

D’accord, dit-il en s’asseyant à côté de moi.

Je lui souris pour bien lui faire comprendre qu’il est le bienvenu. Il m’adresse un bref sourire en retour puis me dit :

- J’ai trouvé du bois pour ton dressing. Il faudrait que je passe voir ta chambre pour prendre des dimensions.

Ainsi, il n’y a plus de décision à prendre, ce sera donc Roméo qui fabriquera ce dressing. Tant pis et tant mieux à la fois. J’apprendrai en le regardant faire après tout.

- Super, tu passes demain après-midi si tu peux.

 Et si on s’échangeait nos numéros ? On l’a fait avec les autres tout à l’heure mais tu es partie trop tôt.

Nous nous donnons donc nos numéros et Roméo en profite pour me dicter ceux des autres.

- Alors, tu as trouvé quoi comme bois ?

 Du bouleau et des planches de chêne.

Je le remercie pour sa gentillesse et enchaîne sur un autre sujet.

- Tu vas au même lycée que nous à Colmar il me semble ?

- Oui, d’ailleurs si tu as des questions n’hésite pas. Je te présenterais volontiers des gens mais pendant les vacances on est tous tellement occupés que je ne verrai pas grand monde avant la rentrée.

- Tu rentres en Terminale c’est ça ?

- Oui et toi en Première.

J’oscille de la tête en guise de oui.

- Je me demande si les jeunes de Colmar sont différents de chez moi. Enfin, je veux dire, Paris puisque chez moi c’est ici maintenant.

- C’est-à-dire ?

- Plus sympas, moins agressifs, moins dans le jugement. Quand je vous vois tous, j’ai bon espoir. Vous êtes accueillants, bien élevés, attentifs les uns aux autres. Par exemple, depuis hier, aucun de vous n’a fait de commentaire désagréable sur nous, que ce soit en face ou par derrière.

- Ça te surprend tant que ça !

- Oui, j’ai l’habitude de faire attention en permanence à ce que je dis, à ce que je fais. Les rumeurs, les choses privées étalées devant tout le monde j’ai bien expérimenté tu sais. Alors, si je pouvais m’éviter de nouvelles catastrophes ça m’arrangerait. C’est pour ça que je te demande comment ça se passe au lycée ici.

- Ben, très bien… C’est pas non plus le monde des bisounours mais je vois pas pourquoi tu te ferais maltraitée.

- Tant mieux, on verra bien.

Je me sens triste soudain. Alors, je regarde droit devant moi et je lance d’une voix ferme.

- Je dois arrêter de penser au passé.

Gênée par ce que je viens de dire, la honte m’envahie. Je m’excuse auprès de Roméo.

- Désolée, j’espère que tu ne me prends pas pour une détraquée.

- Vraiment pas. Tu as l’air d’avoir souffert toi… Si tu as envie de te confier, n’hésite pas. Je n’irai rien répéter promis.

- C’est gentil.

J’hésite un instant puis, les yeux baissés, je me laisse aller à la confidence.

- Il m’est arrivé une sale histoire au collège lorsque j’avais 13 ans. Un garçon s’est vengé de la pire manière possible, juste parce que je n’ai pas voulu rester sa petite amie. J’aurai préféré qu’il me tape dessus, au moins je n’aurais pas eu tous ces problèmes. Il m’a fait passer pour…

Les mots se coincent dans ma gorge, je devrais m’arrêter de parler. Mais au lieu de ça, je prends une grande respiration. Il faut que ça sorte, tant pis pour les conséquences.

- Il a fait circuler une rumeur comme quoi je l’avais trompé avec un gars plus âgé, en couchant avec lui. Au passage il a dit que j’étais une grosse nymphomane au point que je la lui mangeais parfois dans les toilettes des mecs… Je précise que tout ça est faux, au cas où tu aurais des doutes toi aussi.

Cette dernière remarque, je n’ai pas pu l’éviter. Trop habituée à lire le questionnement dans le regard des autres. « Regardez, c’est Lola Valenti, vous pensez qu’elle l’a vraiment fait ? ». Je réalise que je n’ai pas à réagir comme ça avec Roméo. Ici, je suis en sécurité. Ici, personne ne va se poser LA question : qui est vraiment Lola Valenti ?

Donc, à cause de cette mauvaise réputation, je me suis retrouvée isolée. Mes amies et même ma sœur m’ont lâchée. J’ai beaucoup de mal à faire confiance et à aller vers les autres. Entre autres choses…

Roméo m’écoute avec attention. C’est agréable. C’est la première fois que je me confie comme ça à un garçon.

- D’où ton manque de motivation à venir nous voir quand tu venais ici. Tu n’étais pas malade en fait…

- Oui, c’est pour ça, mais garde-le pour toi.

Je regarde au loin. Le soleil décline de plus en plus.

- Tu sais, je ne voulais pas venir ici, mais en fait, c’est l’occasion pour moi de prendre un nouveau départ. Je me sens déjà mieux en très peu de temps. Et puis avec Jenny on est vraiment en train de se rapprocher. Je suis enfin arrivée à lui pardonner.

- Tant mieux. Je te trouve très courageuse. Ce qui t’est arrivé est vraiment injuste.

Ses yeux s’attardent alors sur l’intérieur de mon poignet gauche. Zut, j’ai oublié de mettre mes bracelets.

J’ai eu un épisode mutilation qui n’a pas duré longtemps mais le cœur barré que j’ai gravé n’a jamais disparu.

- C’est à cause de ce qu’il s’est passé, ça ? me demande Roméo en désignant mon triste chef d’œuvre.

- Oui, c’était pour faire comprendre que mon cœur est en panne. Je montrais mon poignet dès que quelqu’un me faisait chier.

- Je suis peut-être indiscret mais tu te fais encore ce genre de chose ?

- Non, lorsque j’ai réalisé que ce que je faisais ne partait pas facilement, ça m’a calmée. J’ai fait quelques entailles sur mes avant-bras avant de faire ce cœur. Elles ne se voient pas beaucoup parce que je n’ai pas appuyé trop fort à l’inverse de ce truc que j’aimerais faire partir maintenant.

- Ça fait quoi au juste, de se taillader ?

- Ça soulage.

Je réalise que je n’ai jamais vraiment réussi à mettre des mots sur cet acte désespéré. Je réfléchis et puis j’explique.

- Ça permet d’extérioriser sa colère, le dégoût qu’on a de soi. En tout cas en ce qui me concerne.

Il regarde de nouveau mon poignet et me dit :

- Avec un tatouage, ça devrait s’arranger je pense.

- Oui, j’y ai pensé…

Roméo pose la main sur mon poignet mutilé puis me regarde dans les yeux. Nous devenons silencieux. L’ambiance change soudainement. Je suis hypnotisée par son regard. Je le trouve tellement… beau. Jusqu’ici, je ressentais un peu d’attirance pour lui, mais la beauté que je perçois à cet instant, me prend aux tripes. C’est stupide, il est exactement le même depuis hier. C’est à n’y rien comprendre ! Je ressens ces fameux « papillons dans le ventre » dont on parle tant. Une petite voix venue de je ne sais où murmure en moi « enfin te voilà ». Cette manifestation étrange restera à jamais gravée en moi. C’est MA preuve que l’âme existe. Je ne suis pas effrayée, au contraire, je ne me suis jamais sentie aussi bien. Je suis… à ma place. Il a dû s’écouler moins d’une minute mais j’ai effectivement eu le temps de ressentir tout cela. C’est une expérience surréaliste que je suis en train de vivre.

Il faudrait que l’un de nous deux se mette à parler et je m’en sens incapable.

- J’ai toujours été curieux de découvrir Paris alors, à l’occasion, si je peux vous accompagner…

- Bien sûr, pourquoi pas.

- Je ne serai certainement pas le seul à vouloir venir je pense.

- Ça me parait un peu compliqué…

Je suis encore sous le choc de ce que je viens de vivre et je fais un effort surhumain pour ne pas le montrer. Mon corps est comme engourdi, à la limite du tremblement. J’ai très chaud d’un coup. Il faut que je rentre, je n’ai plus envie de discuter. Et donc, je me lève.

- Il faut que j’y aille.

Roméo se lève à son tour. Nous marchons côte à côte, dans un silence qui n’en est pas vraiment un. J’aimerais lui prendre la main parce que, bizarrement, je sens que ce serait approprié de le faire et parce que j’ai ce sentiment de le connaitre depuis toujours. Je reprends mes esprits et freine cette main qui allait faire un geste déplacé. J’aimerais savoir si lui aussi vit la même chose que moi. Mon cœur me dit que oui. Cependant, comme Roméo ne montre pas d’émotion particulière, je ne peux pas en être certaine. Et puis je réalise qu’il est devenu quasiment muet, ce qui ne lui ressemble pas.

Nous nous séparons devant chez lui.

- A demain !

- A demain et promis, je garde pour moi ce que tu m’as dit.


  Lorsque je me retrouve dans ma chambre, je me sens à la fois vulnérable et remplie d’une force incroyable. Je suis satisfaite et très émue. Des larmes incontrôlables envahissent mes yeux. Je n’y comprends rien mais je décide de lâcher prise. Ainsi j’accueille ces émotions nouvelles pour moi. Il me semble que toutes les larmes refoulées depuis ces dernières années ont besoin de sortir. Je m’allonge sur mon lit et la tête blottie dans mon oreiller, je pleure tout ce que je peux. C’est un mélange de douleur et de bonheur qui me submerge. Je ne sais pas combien de temps je reste ainsi. Longtemps…

  Après être sortie de cet état second, je sens que je peux définitivement tirer un trait sur le passé. Je ne veux plus jamais souffrir et décide solennellement qu’à partir de cet instant, je ferai tout pour être heureuse.

Je pense à Roméo. Il vient d’appuyer sans le vouloir sur un interrupteur qui m'a fait basculer vers la lumière. Je ramène à moi le souvenir de son regard. En y repensant, je peux mieux mettre des mots sur ce que j'ai ressenti : reconnexion, voyage dans le temps, retrouvailles, amour peut-être… C’est tellement surréaliste et à la fois cela me semble évident. Les papillons se manifestent à nouveau. Je me sens vivante comme jamais auparavant, c’est merveilleux !

Je regarde la photo que j’ai prise tout à l’heure. La qualité est satisfaisante, les couleurs ressortent très bien. Cela me donne envie de commencer une toile. Mon plan de travail et mes tubes de peinture m’invitent au travail mais je me mets à bailler si fort que la fatigue l’emporte sur ma créativité.

Il n’est que 21h50 lorsque je m’endors. "






 


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