Je ne sus quoi lui répondre. Mes parents n’avaient rien remarqué eux.
- Je suis très observatrice tu sais. Et, j’ai également remarqué la façon dont tu regardais ma petite fille. Je sens qu’il y a un lien entre les deux…
J’étais très gêné mais le besoin de me confier fut le plus fort.
- Oui.
- Tu veux en parler ?
- C’est gênant mais ça me ferait du bien alors ok.
Je regarde Sarah droit dans les yeux et je me lance.
J’ai la gorge qui se serre. Je sens des larmes qui se pointent et les essuie d’un geste rageur, honteux de me conduire comme un bébé.
- Fais chier !
- Roméo, doucement.
- Pardon.
- Ce n'est pas grave. Un conseil, n’ai jamais honte de ressentir des émotions fortes et si tu as besoin de pleurer alors ne te retiens pas, c’est humain.
- Les garçons ça doit pas pleurer !
- Connerie!
- Ben moi j’aime pas ça en tout cas. Et je déteste être triste.
- Tu condamnes une histoire sans lui donner une chance de démarrer. Evidemment, vous êtes jeunes donc c’est certain qu’il va falloir être patient mais qui sait…
- J’ai pas de temps à perdre !
- Pourquoi penses-tu que Lola ne peux pas t’aimer elle aussi ?
- Parce qu’elle est trop bien pour moi.
- Tu la connais à peine comment peux-tu dire ça.
- Je sais pas, c’est ce que je ressens.
- A mon avis, c’est plutôt toi que tu dévalorises. Et c’est bien dommage.
- Je suis nul à l’école, j’habite à la campagne et physiquement j’ai rien d’exceptionnel.
- Tu vas devenir un beau garçon, j’en suis certaine et actuellement tu es loin d’être vilain donc enlèves toi ça de la tête. Et puis l’amour ne s’arrête pas au physique.
- D’accord…
- Ensuite, vivre à la campagne ou en ville, ça ne définit aucunement ce que tu vaux.
- Elle connaît plus de choses que moi je suis sûr.
- Et toi tu connais des choses qu’elle ne connait pas.
- C’est vrai.
- Quant à l’école, tu n’es pas nul. Libre à toi de faire évoluer les choses. Ne serait-ce que pour ton amour-propre et réussir dans la vie.
- Ok mais tout ça, ça va pas la faire revenir.
- Ecoute, ma famille va revenir régulièrement et si tu arrives à gagner le cœur de Lola, je suis certaine qu’elle voudra venir plus souvent. Et bien sûr, je l’accueillerai volontiers ici quand elle veut.
Cette information me redonnai l’espoir que je n’avais pas jusqu’à présent.
- Trop bien ! Et elle revient quand ?
- Ah ça… nous n’avons pas défini de date encore et il te faudra patienter de toute façon.
- Pour elle, je trouverai la motivation nécessaire pour attendre. Moi qui suis du genre impatient, je sais que ça va me taper sur les nerfs, mais je n’ai pas le choix. Merci Sarah, tu m’as beaucoup aidé. Si tu peux rester discrète ça m’arrangerais par contre.
- Aucun problème, tu peux compter sur moi et venir me parler dès que tu en as envie.
- Ça marche.
- Au fait, tu essayes de faire quoi avec ce bâton ?
- Une lance. J’aime bien sculpter des choses.
- Très bien, tu aimes donc travailler le bois.
- Ouais, on peut dire ça.
- Alors continue et améliore-toi, je suis sûre que tu peux faire de belles choses.
- Merci.
- Ah et pour finir, il n’y a pas d’âge pour aimer.
Sarah conclu ainsi notre discussion et me fait un clin d’œil comme pour me dire « A toi de jouer maintenant ! ».
Et effectivement, j’ai pris au sérieux tout ce qu’elle m’a dit. La prochaine fois que je verrais Lola, je veux qu’elle découvre la nouvelle version de moi-même. Un garçon sérieux et doué. Je lui montrerai toutes les choses que je vais créer avec le bois et peut-être d’autres choses. Et quand on parlera de l’école, je pourrai évoquer mes notes sans avoir honte puisque je vais vraiment me mettre au boulot.
Les mois passent, mon comportement en classe n’est plus le même et mes amis me reprochent d’être « moins marrant ». Tant pis ! Si je veux avoir de bonnes notes, il faut que j’écoute en classe. A la maison, je partage mon temps entre les devoirs, les jeux vidéo et apprendre à fabriquer des objets. Mon bulletin du deuxième trimestre est très bon et je me vois offrir une boite à outils ainsi qu’une liasse de billets par mes parents.
- Nous sommes très fiers de toi, me dit ma mère, pour te récompenser voici de quoi travailler. Tu pourras t’acheter également les matériaux dont tu as besoin.
- Nous avons vu tes dernières créations : le banc en palette de bois et les animaux sculptés dans du bois de chêne. Tu es vraiment doué et nous t’encourageons à continuer, poursuivi mon père.
Je suis satisfait de provoquer cet élan de reconnaissance chez mes parents. Ne plus avoir de reproches ni de regards désolés, ç’est agréable. "
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" Lola me
revenait parfois en pensée mais je me sentais guéri, libéré de cette emprise
mystérieuse qu’elle avait sur moi. Cette fille, parmi tant d’autre, que je
connaissais à peine, avec qui je n’avais échangé que quelques paroles. Mon
dieu, quelle bêtise, quel temps perdu…
Lorsque j’ai évoqué cela auprès de Sarah le jour où elle m’annonça que sa famille viendrai certainement en Juillet, elle me dit.
- Tu te trompes Roméo, ce n’était pas du temps perdu. Cet amour t’as fait grandir, tu as beaucoup changé depuis que tu as rencontré Lola. Tu t’es ouvert à d’autres occupations bénéfiques pour toi, tu es devenu sérieux, attentif aux autres et tu passes en première générale. Il me semble que tu travailles très dur pour ça si j’en crois tes parents donc félicitation !
- C’est vrai tu as raison. Mais le point négatif de cette rencontre c’est que j’ai peur de revivre cet enfer émotionnel.
- Comment ça ?
- J’ai peur de retomber amoureux.
- Tu n’es pas tombé amoureux de Jade ? Ni de Lisa ?
- Si on compare avec ce que j’ai ressenti pour Lola, alors, pas vraiment. J’étais très épanoui dans ces relations mais c’était pas pareil. Et c’est mieux comme ça je pense.
- Tu verras bien mais crois moi, le grand amour c’est formidable et on y a tous le droit alors promet moi de ne pas lui fermer la porte le jour où il se présentera.
- Promis !
J’ai eu à
cet instant un ressenti étrange. Cette promesse n’était pas à la légère,
j’avais l’impression d’avoir fait un serment et que cela allait m’apporter
quelque chose de positif. Le soir-même, je repensais sans le vouloir à cette
conversation et une nouvelle intuition s’est manifestée. Sarah n’aura peut-être
pas le plaisir de nous voir réunis moi et sa petite fille. Je sentais un gros
malheur noir sur elle. Quelques mois plus tard, on lui diagnostiqua un cancer
et la suite on la connait…
Oui, Sarah
n’aura pas pu constater que j’ai honoré sa promesse, c’est un regret que je
porte encore en moi. "
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